Les accessoires de l’hygiène et de la beauté au XVIIIe siècle

Un visage lisse, au teint éclatant, des mains douces et blanches, une bouche à l’haleine délicate, une perruque soigneusement poudrée, sont les critères majeurs de l’élégance et de la beauté corporelle qui focalisent l’attention des auteurs des traités de parfumerie.

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Pour y satisfaire, une vaste panoplie de produits est disponible.

Lait virginal, pâtes cosmétiques et dentifriches

Il ne suffit pas aux parfumeurs de flatter le sens de l’odorat, il faut qu’ils conservent la beauté de la peau… Surtout celle du visage, pour lui rendre tout le lustre qu’il doit avoir.

Antoine Dejean

Cet objectif proposé par Antoine Dejean sera poursuivi, en particulier, grâce au lait virginal. Ce produit est obtenu avec deux méthodes différentes. La première consiste à délayer dans de l’eau du vinaigre de Saturne (acétate de plomb liquide), la seconde à y mélanger du benjoin. Simon Barbe améliore la formule en y ajoutant une quantité égale d’eau de rose salée…

Vous verrez que se mêlant il s’en fera à l’instant un lait aussi blanc et aussi épais que s’il était naturel, et duquel on peut se frotter le visage et les mains qui deviendront fort blanches.

Pour le soin du corps

Poudres et pâtes cosmétiques sont également très utilisées pour les soins des mains et de beauté. Elles figurent en bonne place dans le catalogue pour les embellissements de Jean Fargeon, et dans le Traité de Simon Barbe. Certaines sont utilisées comme un enduit qu’on laisse sécher jusqu’à ce qu’il tombe en entraînant la crasse. Mais d’autres sont prévues pour laver les mains sans eau par simple friction.

Leur composition fait appel aux amandes douces ou amères pilées avec des jaunes d’œufs et du storax avec parfois des farines d’iris ou de lupin. Le tout est lié avec du lait, plus rarement avec du vinaigre blanc ou de l’eau de vie. Puis ces préparations sont complétées par des gants gras enduits d’un mélange de cire vierge, de graisses animales et de sperme de baleine. En réalité un liquide graisseux contenu dans la boîte crânienne de ce cétacé et qui sont portés la nuit.

Pour les soins de bouche

Il existe une multiplicité d’eaux, poudres, opiats, pommades pastilles et dentifriches. Les caries seront soignées avec un mélange de miel, de myrrhe en poudre, de gomme de genièvre et d’alun. Pour blanchir les dents, Simon Barbe propose un opiat dont le seul énoncé a de quoi les faire grincer :

quatre onces de brique, autant de faïence, une once de corail, pierre ponce et cristal, de chacun demi-once, un petit morceau de sang-dragon et deux gros de cannelle.

Et enfin, contre l’haleine puante, on placera sous la langue au coucher une noisette de myrrhe et, durant la journée, un clou de girofle ou un peu de racine d’ins de Florence.

Flacons à parfums, vinaigrettes et boîtes à mouches

Cosmétiques, poudres et essences de toutes sottes sont contenus dans des boîtes de porcelaine, d’agate, de métal précieux et dans de petits flacons en forme de poire ou de balustre réalisés dans les matériaux les plus divers… Cristal de roche, cristal au plomb, verre ambré, or ou argent émaillé. De délicates vinaigrettes cachent sous une petite grille articulée en filigrane d’or… Enfin, il y a une minuscule éponge imbibée de vinaigre parfumé ou d’une essence florale.

Les flacons : symbole du rang

Le XVIIIe siècle connaît aussi un engouement prodigieux pour les flacons de porcelaine. Porcelaine dure produite par la manufacture allemande de Meissen, fondée en 1709, et, plus tard, par celle de Sèvres. Porcelaine tendre de Chantilly, Mennecy ou Vincennes et des manufactures anglaises qui inondent l’Europe entière de petites boîtes à poudre et de ravissants flacons anthropomorphes ou zoomorphes… Les Chelsea toys (on notera avec une pointe de mélancolie, que le célèbre établissement anglais a été créé par un huguenot français, Charles Gouyn, émigré après la révocation de l’édit de Nantes). Puis, une fois cet attirail déployé, la coquette va procéder à une opération de beauté essentielle, se farder. Son visage débarrassé du masque de nuit et frotté d’une eau de nénuphar, de fraise ou de lis. Et se voit appliquer à l’aide de pinceaux des fards blancs et rouges.

Cet usage qui s’accentue au XVIIIe siècle, conduit à des excès dénoncés par de nombreux médecins. Ils lui attribuent divers maux d’yeux, de dents ou d’oreilles. Mais il est tellement intégré à l’étiquette de la cour, que l’infante d’Espagne, venue épouser le dauphin en 1745 et qui refusait de s’y plier, dut finalement se soumettre.

Coquette, friponne… La mouche est le signe de la personnalité

La dernière touche à cette organisation de la face est apportée par la pose de mouches… Dont la mode se répand de façon fulgurante. Ces petites pastilles de taffetas noir gommé font ressortir la blancheur de la peau. D’abord rondes, elles deviennent étoiles, fleurs, croissants de lune. Elles constituent, en outre, un véritable langage codé. Près de l’œil, c’est la passionnée, au coin de la bouche, la friponne, sur la lèvre, la coquette… Puis les hommes eux-mêmes affichent des mouches assassines. La boîte à mouches d’or, d’ivoire ou d’écaille, s’installe au premier rang des accessoires de beauté.

Jane Abdille Auteur